Éradication du marché parallèle: Kaoubi prône l’unification des taux de change
Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a présidé lundi une réunion de travail dédiée à la mise en œuvre de l’augmentation de l’allocation touristique, désormais fixée à 750 euros. Cette décision vise à améliorer le pouvoir d’achat des voyageurs algériens tout en réduisant leur dépendance au marché informel des devises. Toutefois, elle suscite des réactions partagées parmi les experts et économistes. L’expert économique et financier Mahfoud Kaoubi estime que bien que cette mesure augmente la demande en devises, elle ne pourra stabiliser l’économie que si elle est accompagnée d’une réforme structurelle du marché des changes, notamment l’unification des taux.
Dans son intervention sur les ondes de la « Chaîne III » de la radio nationale, Kaoubi a précisé que l’augmentation de l’allocation touristique, qui représente une multiplication par sept et demie par rapport aux 100 euros alloués auparavant, entraînera une forte demande de devises dans les circuits officiels. Toutefois, il a souligné que cette mesure n’a pas uniquement pour objectif d’améliorer le pouvoir d’achat des voyageurs, mais aussi de répondre à des enjeux économiques plus globaux.
En effet, cette initiative pourrait soulever des questions concernant l’équilibre extérieur du pays et affecter ses réserves de change, déjà sous pression face à une demande accrue. L’expert a d’ailleurs averti :
Qu’avec près de quatre millions d’Algériens susceptibles de bénéficier de cette allocation, la demande en devises pourrait devenir ingérable. Malgré cette hausse, il a ajouté que l’allocation, bien qu’importante, reste insuffisante pour couvrir les frais réels des voyageurs, notamment les coûts de transport entre l’aéroport et leur lieu d’hébergement, ce qui complique encore la situation.
Kaoubi a également rappelé que, malgré cette augmentation significative, le véritable défi reste la question de l’unification des taux de change. Selon lui, la vraie réforme à entreprendre est l’unification des taux de change, car la coexistence de deux marchés parallèles, l’officiel et l’informel, engendre une distorsion majeure qui perturbe les équilibres économiques du pays.
Il estime que la dualité des prix de change est la principale cause de la persistance du marché noir des devises, et qu’il est désormais crucial de revoir le système de change pour éliminer cette distorsion.
Bien que cette révision soit une décision difficile, elle est selon lui essentielle pour stabiliser l’économie et garantir un accès plus transparent et équitable aux devises, tant pour les opérateurs économiques que pour les citoyens.
L’augmentation de l’allocation touristique s’inscrit ainsi dans une dynamique plus large, visant à réduire cette dualité des taux de change. Cependant, Kaoubi souligne que pour que cette mesure ait un impact réel, des réformes structurelles plus profondes sont nécessaires. Une des solutions envisagées pourrait être la libéralisation progressive du marché des changes, ce qui offrirait un accès plus fluide et plus juste aux devises. À ce propos, l’ouverture de bureaux de change dans les aéroports et ports, une initiative prévue par la Société de gestion des services et infrastructures aéroportuaires d’Alger, représente une première étape pour capter une partie des devises qui circulent actuellement dans le marché parallèle.
En outre, Kaoubi insiste sur la nécessité d’agir sur la qualité des prix afin de parvenir à un marché des devises unifié.
Pour lui, des prix unifiés conduisent à des marchés unifiés, et cela permettrait à l’économie algérienne de retrouver un équilibre plus stable. Il estime qu’une révision en profondeur du système de change permettrait de libérer le potentiel économique du pays et d’éliminer la perversité des prix qui nuit à l’efficacité du système.
Bien que l’augmentation de l’allocation touristique offre des avantages immédiats, Kaoubi avertit qu’elle ne pourra résoudre les problèmes économiques du pays de manière durable que si une réforme structurelle du marché des changes est mise en place. L’alignement des taux officiels et parallèles est donc essentiel pour garantir une stabilité à long terme de l’économie algérienne. Pour cela, une approche graduelle et réfléchie est indispensable afin de répondre aux besoins des citoyens tout en assurant une viabilité économique pérenne.
Par Mourad A.
