Suite à la perte du marché algérien: Les exportations françaises du blé plongent
Le rapport d’Argus Media souligne une chute libre des exportations françaises de blé hors Union européenne en 2025-2026. La perte du marché algérien, client historique de la France jusqu’à fin 2024, accentue cette tendance et contribue à des stocks record, fragilisant davantage la compétitivité du blé tricolore sur la scène mondiale.
Selon les dernières prévisions d’Argus Media, la France devrait exporter 8 millions de tonnes de blé vers les pays hors Union européenne au cours de la campagne 2025-2026. Un volume qui, bien que conséquent, représente le troisième plus bas niveau de la décennie. Cette contre-performance s’explique en grande partie par la perte du marché algérien, qui constituait jusqu’à la fin 2024 l’un des débouchés les plus importants pour le blé français. L’Algérie, premier importateur africain de céréales, a longtemps été considérée comme un partenaire privilégié de la filière céréalière française. Sa décision de se détourner du blé tricolore, au profit d’autres fournisseurs, a bouleversé l’équilibre des exportations.
Argus estime que la France terminera la campagne 2025-2026 avec 4 millions de tonnes de blé en stock, soit le plus haut niveau enregistré depuis deux décennies. Cette accumulation traduit non seulement la difficulté à écouler les volumes disponibles, mais aussi la perte de débouchés commerciaux qui auraient pu absorber l’abondante récolte de cette année. Avec une production évaluée à 33,4 millions de tonnes, en nette hausse par rapport à la récolte catastrophique de 2024 (25,6 Mt), la France aurait pu espérer retrouver de la vigueur sur le marché mondial. Mais la conjoncture internationale défavorable limite sérieusement ses marges de manœuvre.
Au-delà de la perte du marché algérien, la France doit faire face à une concurrence accrue sur le marché mondial du blé. La Russie s’impose encore comme un acteur dominant, avec une production projetée de 86,1 Mt, soit la troisième plus importante de son histoire. L’Ukraine, malgré le contexte difficile, affiche une récolte de 21,9 Mt. En Europe, l’Espagne, la Roumanie et la Bulgarie annoncent des récoltes record, ce qui accentue la pression sur les prix. Dans l’hémisphère sud, l’Australie et l’Argentine profitent de conditions climatiques favorables et de stocks initiaux confortables pour renforcer leur compétitivité. Résultat : les exportateurs français peinent à s’imposer, d’autant que la vigueur de l’euro face au dollar réduit encore leur attractivité sur le marché international.
Cette situation pèse directement sur les producteurs français. Argus calcule que le prix actuel du marché, estimé à 193,50 €/t CPT Rouen, est environ 30 €/t en dessous du seuil de rentabilité des exploitants. En d’autres termes, les agriculteurs vendent aujourd’hui à perte. Sans débouchés suffisants et face à la pression concurrentielle, la filière céréalicole française risque de connaître une crise prolongée. Seule une hausse inattendue de la demande mondiale, une rupture dans l’offre internationale ou de nouvelles tensions géopolitiques pourraient inverser la tendance.
Par M. A.