27/03/2025
ACTUALITECHRONIQUECHRONIQUE/EDITOCONTRIBUTION / CHRONIQUE

Chronique Eco: Quand la spécialisation contraint les choix économiques ; il est encore possible de s’en sortir.

Les pays pétroliers ont tous souffert de la spécialisation de leurs économies sur le segment hydrocarbures et leur dépendance à cette ressource. Cette dépendance varie certainement d’un pays à un autre. De même certains pays ont mis en œuvre des politiques de diversification il y a déjà plusieurs décennies, c’est le cas notamment de l’Arabie Saoudite, de l’Iran, du Mexique, du Nigéria, de l’Indonésie et à un degré moindre ou plus tardivement l’Irak et les Emirats Arabes Unis. Paradoxalement, ce sont les pays grands producteurs qui ont pris conscience de cette dépendance et de ses effets sur le développement économique ; alors que les pays producteurs moyens ou faibles se sont accommodés de cette spécialisation (Algérie, Libye, Qatar, Angola…). La première destination de la diversification va généralement vers la pétrochimie et les industries à forte composante énergétique (Ciments, Aciers, engrais,…). A priori, ce choix peut paraitre rationnel dans le sens où la dotation en énergie donnerait un avantage compétitif à ces produits gros consommateurs d’énergies sur les marchés internationaux. Mais en réalité, ces pays font un transfert de valeur vers des entreprises commerciales voire vers d’autres pays. Si ces pays exportent ces produits avec une grande valeur ajoutée accumulée localement, la situation peut être profitable car elle aura permis de faire travailler d’autres filières industrielles locales. Donc le problème est de savoir quel est le seuil acceptable de subvention de l’énergie destinée aux produits exportables et quel niveau de contribution à la valeur ajoutée locale à ces mêmes produits.  C’est ce calcul économique, indispensable dans les politiques industrielles, qui manque souvent dans nos administrations et entreprises. Exporter des produits à forte composante d’énergie fortement subventionnée peut s’avérer contreproductif pour l’économie nationale, mais certainement très profitable pour l’entreprise exportatrice. Cette exportation s’apparenterait à une exportation d’énergie (gaz essentiellement). La stratégie de l’entreprise n’est pas la stratégie de l’Etat.

La sortie de la spécialisation ne se fera pas par des solutions qui appauvrissent davantage l’économie nationale ; l’obsession pour l’exportation ne doit pas faire écran à une vraie politique de diversification qui ne viserait pas nécessairement et exclusivement l’exportation mais aussi la substitution des importations. Il est vrai que l’exportation stimule les entreprises, accroit leur compétitivité, améliore la visibilité du pays et permet la confrontation internationale.  Améliorer le solde de la balance commerciale est meilleur indicateur que faire croitre les exportations quel qu’en soit le prix.

Les directions de diversification sont nombreuses dans une première étape et elles deviennent plus sélectives dans les étapes suivantes.  Pour un pays comme l’Algérie, on ne peut pas faire l’économie d’une politique de ré-industrialisation par les industries manufacturières, d’autant plus qu’il y a encore de la place pour ces filières grâce à une demande domestique solvable (soit par substitution des importations, soit par une sophistication de la production) et des possibilités d’exportation des produits manufacturés. L’autre direction, moins débattue, serait celle de l’industrie des services supérieurs ou à forte composante technologique. La première direction est déjà en cours grâce aux dernières mesures incitatives introduites par le code des investissements et la loi sur le foncier industriel. La deuxième direction est une trajectoire nouvelle dans le contexte algérien ; nous avons toujours privilégié le tangible « la matière » sur l’immatériel. Pourtant dans l’économie moderne ce dernier est beaucoup plus « productif » et plus profitable à court terme. En termes d’investissement, l’Algérie dispose d’une partie du capital principal, la ressource humaine. Comment va –t-on utiliser efficacement les cohortes de sortants des universités classiques et des nouvelles écoles créées au cours des dernières années, particulièrement celles orientées vers le numérique, les nanotechnologies, l’IA, la robotique et les télécoms, Data science, génie logiciel … ? Si on ne leur offre pas des écosystèmes performants de travail et des activités valorisantes, soit ils vont végéter dans des tâches administratives, soit ils partiront à l’étranger. C’est aujourd’hui qu’il faut planifier l’emploi de ces compétences rares. L’autre partie du capital n’est pas disponible en Algérie ; il s’agit de l’ingénierie, de la technologie, de l’expertise de haut niveau, des structures d’innovation et de développement, du marketing spécifique, des modèles d’affaires etc… Cette partie du capital peut se rendre disponible dans le cadre d’un partenariat puissant avec un pays avancé dans ce domaine. Surtout pas de partenariat d’assistance, mais un partenariat capitalistique et d’affaires pouvant se concrétiser par des structures nouvelles, inédites.  Un partenariat qui nécessitera une mise sur la table de plusieurs milliards de dollars sur plusieurs années. Les pays d’Asie comme la Chine ou la Corée du Sud pourraient être de bons partenaires à condition de montrer le sérieux  et la permanence dans les idées. Avec cette deuxième direction, on pourra produire une rupture totale dans notre modèle économique ; et le reste va suivre.  Osons le pari de la rupture !!!!!

Publicité

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *