22/05/2025
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La consommation nationale augmente de 4 % par an: Une refonte urgente du modèle énergétique s’impose

L’Algérie est confrontée à une augmentation soutenue de sa consommation énergétique, avec un taux moyen de croissance de 4 % par an depuis une décennie. Ce constat a été mis en avant par Merouane Chabane, Directeur général de l’Agence nationale pour la promotion et la rationalisation de l’utilisation de l’énergie (APRUE), lors de son intervention sur la « Chaîne III » de la radio nationale. Il a souligné qu’à ce rythme, la consommation pourrait croître de 50 % en dix ans.

Cette progression, loin d’être passagère, s’inscrit dans une tendance structurelle liée à la dynamique économique du pays. L’industrialisation, les vastes programmes de construction de logements et le développement du secteur tertiaire en sont les principaux moteurs. Toutefois, une part significative de cette énergie est, selon Chabane, tout simplement gaspillée. « Ce gaspillage s’explique en grande partie par un système énergétique encore largement tributaire des ressources fossiles, génératrices d’importantes émissions de carbone et soumises à un risque d’épuisement », a-t-il précisé. Dans ce contexte, une refonte du modèle énergétique national s’impose.

Le Directeur général de l’APRUE a insisté sur la nécessité d’un nouveau mix énergétique, visant à intégrer 30 % d’énergies renouvelables d’ici 2035. Cette ambition s’inscrit dans le cadre d’un Programme national de maîtrise de l’énergie (PNME), planifié jusqu’en 2035 et structuré autour d’un plan d’action quinquennal pour la période 2025-2029. L’objectif est clair : réduire de 15 % la consommation énergétique nationale grâce à l’introduction de technologies plus efficaces, au soutien des consommateurs et à une meilleure régulation du marché.

Le secteur du bâtiment, notamment résidentiel, représente un enjeu majeur puisqu’il absorbe à lui seul 46 % de la consommation énergétique totale, dont 75 % pour les logements individuels. Cette situation s’explique par la prolifération des constructions et l’usage croissant d’équipements de confort énergivores. « Ce secteur est responsable d’une hausse annuelle de 5 % de la consommation globale », a souligné Chabane. Pour y remédier, l’APRUE adopte une approche intégrée, promouvant l’isolation thermique, le recours à des équipements performants, l’installation de systèmes de chauffage centralisé urbain, ainsi que la généralisation des bâtiments à haute efficacité énergétique. Des projets pilotes sont en cours, comme l’utilisation de peintures réflectives sur les toitures des bâtiments tertiaires afin de réduire leur température et limiter le recours à la climatisation.

Parallèlement, des mesures incitatives sont mises en place pour favoriser l’adoption d’équipements plus économes. L’APRUE propose par exemple des subventions allant jusqu’à 50 % pour le remplacement des anciens climatiseurs par des modèles performants fabriqués localement. D’autres études visent à promouvoir des systèmes de chauffage et de refroidissement centralisés, en particulier dans les hôpitaux, les campus universitaires et les futurs quartiers résidentiels.

Le secteur du bâtiment concentre 46% de la consommation totale

Au-delà des solutions technologiques, la question des comportements énergétiques est également cruciale. « Réduire la consommation énergétique, c’est aussi une question de comportement », a rappelé le DG de l’Aprue, plaidant pour une véritable culture de la sobriété énergétique. L’agence encourage ainsi l’utilisation de pompes à chaleur au gaz et développe des plateformes numériques afin de faciliter l’accès aux aides et d’orienter les citoyens vers des fournisseurs agréés.La régulation du marché constitue un autre chantier prioritaire. Pour assurer un meilleur encadrement, un laboratoire national d’essais de performance énergétique est en cours de création. Il visera à contrôler la conformité des équipements mis sur le marché. Aujourd’hui, la réglementation reste largement déclarative, sans mécanismes de sanction efficaces. Chabane a regretté que « nous continuons d’importer des équipements non conformes comme les lampes à incandescence, alors qu’il existe des alternatives LED locales ».

Le secteur industriel, qui représente 25 % de la consommation nationale, concentre les usages les plus énergivores, notamment dans la sidérurgie, la cimenterie et la production de fertilisants. Une réglementation impose aux sites consommant plus de 2000 tonnes équivalent pétrole (TEP) de réaliser des audits énergétiques obligatoires. Cependant, de nombreuses entreprises tardent à s’y conformer. Pour les inciter, l’APRUE prévoit de financer jusqu’à 70 % des études de faisabilité et 30 % des investissements dans des équipements plus performants, tout en envisageant des sanctions pécuniaires pour les contrevenants. Comme l’a souligné le directeur, « ces industriels doivent comprendre que l’efficacité énergétique est aussi une exigence de compétitivité à l’international », notamment face à des normes environnementales de plus en plus strictes.

Afin de piloter cette transition, l’agence annonce la relance du comité intersectoriel de maîtrise de l’énergie, réunissant une cinquantaine d’acteurs issus de la société civile, des administrations, de l’industrie et du monde scientifique. L’objectif est d’élaborer collectivement une feuille de route pour une transition énergétique réussie. « Nous n’avons plus le luxe de retarder les réformes. La rationalisation énergétique est un impératif stratégique, économique et environnemental », a-t-il conclu.

Par Mourad A.

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