Les options du gouvernement face au défi énergétique
Entre 2020 et 2024, la consommation énergétique de l’Algérie a littéralement explosé, passant de 30 millions à 73 millions de tonnes équivalent pétrole (TEP). Cette augmentation vertigineuse, révélatrice de la montée en puissance de la demande nationale en énergie, est devenue une préoccupation majeure pour le gouvernement. Face à ce défi sans précédent, les autorités misent sur une diversification énergétique ambitieuse, principalement axée sur le développement des énergies renouvelables.
Lors de son intervention au Forum de la radio nationale, Noureddine Yassaâ, secrétaire d’État chargé des Énergies renouvelables au ministère de l’Energie, a souligné l’urgence de transformer le mix énergétique national. « La consommation énergétique a doublé en seulement quatre ans en raison de facteurs à la fois structurels et conjoncturels, notamment la croissance démographique, l’essor industriel et l’augmentation du parc immobilier», a-t-il expliqué. Selon lui, cette hausse représente un défi majeur pour l’avenir énergétique du pays. Afin de sécuriser l’approvisionnement énergétique tout en répondant aux exigences de durabilité, l’Algérie a engagé un processus de diversification de son mix énergétique. L’objectif est ambitieux : porter la part des énergies renouvelables à 30 % d’ici 2035, soit une capacité de production de 15 000 mégawatts (MW).
Pour atteindre cet objectif, plusieurs projets phares ont déjà été lancés. Un premier lot de 2 000 MW d’énergie solaire photovoltaïque a été lancé entre 2023 et 2024, avec les premières centrales prévues pour entrer en service dès la fin de l’année 2025. Parallèlement, dix sites ont été identifiés pour la production de 1 000 MW d’énergie éolienne. « La transition énergétique n’est plus un choix, mais une nécessité. Nous devons anticiper les besoins futurs en misant sur des ressources propres et durables », a insisté Noureddine Yassaâ.
L’Algérie, bénéficiant d’un ensoleillement exceptionnel et de vastes territoires exposés aux vents, dispose d’un potentiel considérable en matière d’énergies renouvelables. Les études les plus récentes montrent des vitesses de vent pouvant atteindre 8 mètres par seconde dans certaines régions, tandis que le rayonnement solaire figure parmi les plus élevés au monde. « Nous avons réévalué nos cartes et nos études pour identifier les zones à fort potentiel. Désormais, il ne s’agit plus seulement de produire pour la consommation intérieure, mais aussi d’envisager des exportations vers l’Europe », a précisé Yassaâ. En effet, l’Algérie travaille sur le projet MedLink, qui prévoit de relier le réseau électrique national à l’Italie via un câble sous-marin, permettant l’exportation de jusqu’à 5 000 MW d’énergie renouvelable. En plus de l’énergie solaire et éolienne, l’Algérie mise également sur l’hydrogène vert, considéré comme un vecteur énergétique d’avenir. Un projet pilote de 50 MW est déjà en cours, mené par Sonatrach en partenariat avec des acteurs européens, notamment allemands et autrichiens. « L’Algérie a l’ambition de devenir un leader régional dans le domaine de l’hydrogène vert. Nos capacités, notre expertise et nos infrastructures gazières existantes nous placent en position de force », a affirmé le secrétaire d’État.
Pour assurer la pérennité de ce virage énergétique, l’Algérie investit également dans la modernisation de son réseau électrique. Le raccordement des réseaux nord et sud est en cours, avec l’introduction d’outils numériques et d’intelligence artificielle pour optimiser la gestion de l’énergie. « Il est impératif de moderniser nos infrastructures pour absorber la production des nouvelles capacités et garantir une distribution fiable sur l’ensemble du territoire », a expliqué Yassaâ.
Malgré les défis, l’optimisme est de mise. La baisse des coûts des panneaux solaires et des équipements de stockage ouvre la voie à une rentabilité accrue des projets renouvelables. De plus, l’Algérie bénéficie d’une expertise historique en matière de production et de distribution d’électricité, ce qui constitue un atout considérable pour attirer les investisseurs étrangers.
Pour Noureddine Yassaâ, la diversification énergétique est aussi une réponse aux enjeux économiques et environnementaux. « Réduire notre dépendance aux énergies fossiles, c’est aussi libérer du gaz naturel pour d’autres usages industriels et pour l’exportation. Cela contribue à renforcer l’économie nationale et à garantir une meilleure gestion de nos ressources », a-t-il conclu. Alors que la demande énergétique mondiale continue de croître, l’Algérie entend s’affirmer comme un acteur incontournable de la transition énergétique en Méditerranée et en Afrique. Les défis sont nombreux, mais la volonté de s’inscrire dans un avenir plus vert et plus durable est désormais clairement affichée.
Par Mourad A.