Manque d’investissements dans le gaz naturel
Vers de graves chocs énergétiques dès 2030
En l’absence d’investissements conséquents, la production du combustible fossile le moins polluant devrait passer de 4100 milliards de m3 en 2023 à 3134 milliards de m3 en 2030, avant de tomber à moins de 1000 milliards de m3 au milieu du siècle en cours.
La baisse continue des investissements dans l’exploration et l’exploitation des gisements de gaz naturel dans un contexte de décarbonation à marche forcée risque de provoquer de graves chocs énergétiques à partir de 2030, selon un rapport publié le 19 octobre par l’Union internationale du gaz (IGU).
Intitulé « Global Gas Report 2023 », le rapport précise que le marché mondial du gaz a montré une grande résilience face à des chocs extrêmes en 2022, sortant de l’année la plus turbulente de son histoire, plus agile et plus adaptable que jamais.
La production de ce combustible fossile moins polluant que le pétrole et le charbon a enregistré une augmentation marginale 0,5 % durant l’année écoulée. La baisse de la production russe a été largement compensée par une augmentation de l’offre en Amérique du Nord, au Moyen-Orient, en Europe et en Asie. L’Afrique a, quant à elle, enregistré une légère baisse de sa production en 2022.
La demande mondiale de gaz a diminué de 1,5% en 2022 comparativement à 2021. Les plus fortes baisses de la demande ont été enregistrées en Europe et en Asie, mais elles ont été partiellement compensées par une forte croissance en Amérique du Nord.
Malgré cette diminution de la demande, qui s’explique essentiellement par les chocs d’approvisionnement et de prix liés au conflit russo-ukrainien, le marché reste sous-approvisionné et hautement sensible aux fluctuations de l’offre et de la demande.
Elaboré en collaboration avec le cabinet de conseil Rystad Energy et le leader européen du transport de gaz naturel Snam, le rapport indique également que la production risque de s’effondrer progressivement durant les années à venir, en raison notamment d’une réduction de 58 % des investissements dans le secteur gazier entre 2014 et 2020.
Des pénuries et des hausses des prix
Les investissements se sont redressés au cours des deux dernières années. Ils demeurent cependant largement concentrés sur les projets d’extension de gisements existants plutôt que sur l’exploration et le développement de nouveaux champs gaziers. La plupart des acteurs du secteur font preuve de prudence et se montrent peu enclins à prendre des risques accrus, en raison des tendances actuelles en matière de transition énergétique, des incertitude relatives à l’accès au financement et du risque lié aux politiques publiques interdisant l’utilisation des combustibles fossiles à l’avenir.
En l’absence d’investissements conséquents, la production cumulée des différents projets gaziers déjà en cours d’exploitation et de ceux qui ont déjà fait l’objet d’une décision finale d’investissement (DFI) à travers le monde devrait atteindre environ 4100 milliards de mètres cubes (m3) cette année, avant de tomber à environ 3134 milliards de m3 en 2030, à mesure que les gisements arriveront à maturité.
La production devrait ensuite chuter à 1849 milliards de m3 en 2040, et à un peu moins de 1000 milliards de m3 au milieu du siècle en cours. Ce qui risque fort d’entraîner des pénuries et de hausses des prix plus graves et plus fréquentes que celles enregistrées ces dernières années. D’autant plus que le scénario climatique le plus ambitieux, qui vise à limiter le réchauffement de la planète à 1,5°C par rapport aux températures de l’ère préindustrielle, grâce notamment à des investissements massifs dans les énergies renouvelables et des changements de comportement, est entouré de très fortes incertitudes, en particulier à court et à moyen terme.
Pour éviter de nouvelles crises énergétiques durant les décennies à venir, l’Union internationale du gaz recommande de poursuivre les investissements dans la chaîne de valeur du gaz naturel, en vue de répondre à la demande mondiale et à la croissance prévue dans certaines régions, tout en accélérant le développement des gaz renouvelables tels que le biométhane et l’hydrogène vert et les procédés de captage et stockage du dioxyde de carbone.
Par R E/Agence