Sécurité alimentaire à l’orée 2030: L’Algérie face à ses défis
La sécurité alimentaire consiste à se donner les moyens de produire, de stocker et de stabiliser l’approvisionnement dans le temps. C’est en résumé l’affirmation faite par le professeur Ali Daoudi, enseignant-chercheur à l’École supérieure d’agronomie, lors de la 2e édition de la Conférence économique « Défis financiers mondiaux 2030 », organisée à Alger sous le thème Souveraineté alimentaire, inclusion financière et économie de la croissance.
Pour cet enseignant, l’Algérie doit relever des défis importants pour assurer sa sécurité alimentaire. Dans sa stratégie alimentaire, l’Algérie doit s’appuyer sur plusieurs leviers. Daoudi cite l’impératif de renforcer la production nationale, de se doter de moyens de stockage importants, mais surtout de choisir quel type d’agriculture nous voulons développer.
Convaincu que l’agriculture constitue un atout majeur pour les nations, le professeur Ali Daoudi a recommandé le renforcement des connaissances agricoles afin de mieux maîtriser les phénomènes climatiques, en impliquant les agriculteurs, véritables acteurs du secteur. Il a également suggéré de leur apporter un soutien financier permanent pour les aider à faire face aux aléas climatiques.
Ceci dit, il préconise avant tout de choisir quel type d’agriculture nous voulons pour les générations futures. Selon lui, cela signifie qu’il existe au moins deux grands modèles d’agriculture à développer en Algérie : le modèle de l’agriculture productiviste, qui mise sur une amélioration rapide et continue, et celui de la productivité, via des investissements dans les différents facteurs de production, notamment technologiques.
Si aujourd’hui nous enregistrons de bonnes performances agricoles, pour Daoudi, « c’est un fait. Mais il existe aussi des défis très importants. La population algérienne continue de croître de manière significative. Nous serons à 60 millions d’âmes d’ici 2050. Cela signifie qu’il faudra produire beaucoup plus que ce que nous produisons aujourd’hui. Nous sommes 45 millions aujourd’hui et avons du mal à nous auto-suffire en produits agricoles, même si nous réalisons des progrès considérables. Mais cela reste un défi qui n’est pas encore atteint », souligne-t-il.
Pour cet expert, la sécurité alimentaire passe également par le choix de notre type de consommation, de notre façon de procéder à l’irrigation, et de la manière dont nous avons su stocker une partie de notre production.
Il ajoute que notre agriculture se développe dans un environnement extrêmement difficile sur le plan naturel, car « nous faisons face à des phénomènes extrêmes d’aridité, de salinité, etc., pour lesquels il va falloir innover pour produire ».
En somme, il s’agit de l’agriculture du futur, et il précise : « Il faut sécuriser et rendre durable ce secteur en prenant aujourd’hui les bonnes décisions pour que les générations futures profitent de ce que nous bénéficions aujourd’hui en matière de sécurité alimentaire. C’est une responsabilité générationnelle, une responsabilité collective. Pour cela, il faudrait ouvrir un débat sociétal. »
De son côté, Abdelwahab Ziani, président de la Confédération des industriels (CIPA), a souligné l’importance de l’innovation, particulièrement dans la gestion de l’eau. Il a assuré qu’au sein de sa confédération « il y a beaucoup de projets innovants et intelligents, capables de réduire la consommation d’eau pour l’irrigation dans le Sud de près de 50 % grâce à de nouvelles technologies. Aujourd’hui, nous pratiquons encore l’irrigation classique, mais nous sommes en train de passer progressivement à une irrigation multidimensionnelle et futuriste, qui va réduire considérablement la consommation d’eau pour les grandes cultures. »
Dans ses propos, Ziani met en avant l’ambition de l’Algérie de « transformer les matières premières africaines sur le continent africain et de rediriger les produits vers ce même continent. C’est ainsi que nous pouvons augmenter ce chiffre et réduire les 4 500 milliards, et je pense que l’ambition de l’Algérie est de viser 5 % de ces 4 500 milliards, soit près de 200 milliards. En ce qui concerne les exportations à l’horizon 2030, elles sont sur la bonne voie. Nous avons une vision pour 2050, où nous visons un chiffre de 50 milliards de dollars hors hydrocarbures », a-t-il conclu. Trop optimiste ou juste pragmatique, cette vision n’est pas insurmontable, à condition que les efforts nécessaires soient fournis, soutenus par une volonté politique engagée et affirmée.
Par Réda Hadi