21/01/2025
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« Chronique Eco » Les BRICS+ : une attraction et de nouveaux défis.  

Les succès se succèdent pour les BRICS, la force d’attraction se consolide, les candidatures à  l’adhésion se multiplient, de l’autre côté, celui du Grand Occident, les peurs s’installent et les stratégies de faire barrage à la dynamique des BRICS se préparent.

Au lendemain de la 16ème session (Kazan, 22-24/10/2024), le succès devient lourd à porter par les fondateurs, a-t-on atteint le niveau de maturité qui permet d’aller plus loin dans l’accueil de nouveaux adhérents, dans les questions à prendre en charge et surtout dans la manière d’organiser le « Club ». Ce dernier devient très visible et surtout très surveillé, alors de nouveaux enjeux se dessinent. Les questions sur les domaines d’intervention demeurent les plus importantes pour l’avenir. Faut-il rester dans le champ économique, ou élargir le champ vers les questions géopolitiques voire sociétales ?

La puissance du groupe est maintenant avérée. Il représente 45% de  la population mondiale, 36/38% du PIB mondiale et un potentiel énorme en matière de ressources naturelles (énergie, terres rares, …) et en diversités écologiques.  

Le BRICS a eu aussi ses revers depuis son élargissement à 10 membres. D’abord c’est l’Argentine qui ne rejoint pas le groupe suite à l’élection d’un nouveau président ultra libéral et surtout totalement inféodé aux Etats Unis ; ensuite c’est au tour de l’Arabie Saoudite, nouvellement admise en 2023, de briller par l’absence de son « Roi » MBS à la 16ème session d’octobre 2024 ; ici aussi l’influence des USA n’est pas à exclure.  Cela fait partie des ripostes des USA et de l’Occident au succès de la nouvelle organisation. Mais il a eu aussi des succès inimaginables sur le plan géopolitique. La résolution de différends ou au moins l’amorce de dialogues dans ce sens. C’est le cas notamment de la  reprise du dialogue  entre la Chine et l’Inde sur un litige frontalier dans le Bengale, la rencontre entre les présidents Azerbaidjanais et son homologue Arménien, ou encore l’acceptation par la Russie d’un plan de règlement du conflit Ukraine-Russe présenté par la Chine et le Brésil.

L’apparent succès du sommet des BRICS à Kazan ne se reflète pas dans le communiqué final. La déclaration finale du sommet publiée mercredi après-midi est en revanche restée à un stade souvent vague. Dans le domaine économique, la Russie n’avait officiellement pas mis la barre très haut et de fait, rien de concret n’a donc été décidé au sujet d’un système financier alternatif. Le texte de 43 pages au total a notamment listé des engagements sans limites de temps du type : « Nous convenons d’examiner la possibilité de mettre en place un système BRICS de paiement transfrontalier indépendant. » Suivi de cette précision : « Il ne s’agit en aucun cas de prétendre remplacer le système en place, mais de compléter les infrastructures existantes. »

Il semble que les fondateurs de l’organisation sont eux même surpris par la dynamique créée et par l’enthousiasme des pays du Sud pour rejoindre cette organisation, vue comme une revanche de l’histoire sur l’Occident hégémonique, arrogant, prédateur et surtout devenu autiste aux problèmes du Sud. Les institutions internationales nées dans l’après guerre ne sont plus représentatives ni des pays du sud ni capables de prendre en charge les besoins de ces pays en matière de développement, au contraire elles sont vues comme des instruments au seul service de l’Occident dominant. D’ailleurs le communiqué final insiste sur nécessité de réformer le système en place en prenant soin de ne pas aller à un changement radical mais en se limitant à la gouvernance mondiale en accordant plus de droits, plus de sièges  dans les instances dirigeantes au profit du Sud. 

Face à cette dynamique créée par le mouvement BRICS et les attentes exprimées par le désir d’adhésion de plusieurs Etats de tous les continents, les défis pour les fondateurs sont nombreux à commencer par la définition des règles et des grands principes pour renforcer la cohésion du groupe dont les conflits entre les membres sont encore vivants : Chine/Inde, Egypte/Ethiopie, Arabie Saoudite/Iran ou Iran/Emirats. La décision de ne pas faire entrer de nouveaux membres à part entière semble être liée à cette difficulté d’organiser le fonctionnement du groupe en l’absence de règles précises. Certains membres fondateurs sont plus favorables à une plus grande ouverture vers de nouveaux adhérents, c’est le cas de la Chine, alors que d’autres sont plutôt favorables à une consolidation du groupe fondateur avant toute ouverture, c’est la position, entre autres, de l’Inde. La création d’un groupe de membres/partenaires, une espace de « salle d’attente », semble être le compromis entre les deux positions des membres fondateurs.  Aussi, la pratique du droit de véto à l’égard des candidats à l’adhésion par les membres fondateurs est déjà critiquée et renvoie à des pratiques au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies. Cette question de droit de véto ou de statut privilégié des membres fondateurs se posera un jour si l’on veut être plus crédible et plus conforme aux règles universelles d’équité entre les membres sans distinction, sinon on reproduira le système en place très critiqué et très hégémonique par un autre système identique à part le changement des acteurs. Les membres fondateurs sauront-ils être à la hauteur de ce challenge de donner les mêmes droits à tous les adhérents. L’avenir nous le dira.

ANOUAR EL ANDALOUSSI

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