Développement de la filière viande rouge: Les propositions des éleveurs
L’Algérie, confrontée à une demande croissante de viande rouge et à une production nationale insuffisante, a été contrainte de relancer les importations pour répondre aux besoins du marché. Cette situation met en évidence les défis structurels de la filière viande rouge. Il devient donc impératif de mettre en place une organisation solide et des mécanismes efficaces afin d’augmenter la production locale et de répondre aux besoins du marché intérieur, tout en réduisant la dépendance aux importations, comme l’a souligné Brahim Amrani, membre de la Fédération nationale des éleveurs.
Les principales contraintes freinant la production nationale de viande rouge en Algérie sont d’ordre environnemental, économique et organisationnel. S’exprimant sur la « Chaîne III » de la radio nationale, Brahim Amrani a précisé : « La question de l’eau est cruciale pour la production de viande rouge en Algérie. La rareté des ressources hydriques, exacerbée par les sécheresses récurrentes, constitue un obstacle majeur à l’élevage du bétail, notamment dans les régions du sud et de l’est du pays. » À cela s’ajoute l’insuffisance de pâturages et de fourrages adaptés, un autre défi de taille. Les éleveurs sont régulièrement confrontés à un manque de ressources alimentaires pour leurs animaux, ce qui nuit à la productivité et à la croissance du cheptel. De plus, la filière souffre d’une organisation inefficace. « L’organisation de la filière viande rouge manque de coordination et de visibilité. L’absence de structures d’abattage locales dans le sud entraîne des coûts supplémentaires et nuit à la compétitivité de notre production face aux importations », a-t-il ajouté. Cette gestion fragmentée et déséquilibrée entraîne des inefficacités et rend la filière moins compétitive, obligeant ainsi le pays à importer pour combler le vide laissé par une production intérieure insuffisante.
Pour surmonter ces obstacles, plusieurs mécanismes doivent être mis en place pour soutenir la filière et relancer la production nationale. L’intervenant a affirmé : « Il est essentiel d’améliorer l’accès à l’eau pour les éleveurs, notamment en développant des infrastructures telles que des forages et des puits, particulièrement dans les zones rurales et arides. » Parallèlement, il est impératif de promouvoir la production locale de fourrages et de semences adaptées aux conditions climatiques du pays, afin d’assurer une alimentation suffisante pour les animaux et d’encourager l’autonomie des éleveurs dans la gestion de leurs cheptels. Il a aussi insisté sur l’importance de : « Mettre en place des politiques attractives pour inciter les éleveurs nomades à se stabiliser et à développer des exploitations durables. » La création de zones herbagées aménagées et l’acheminement de l’eau nécessaire permettront leur transition vers une agriculture plus sédentaire, favorisant une gestion plus rationnelle des ressources naturelles.
L’organisation de la filière représente également un axe stratégique. L’État doit jouer un rôle clé en fournissant une assistance technique aux éleveurs, en les accompagnants dans l’adoption de pratiques modernes et en imposant des normes de production efficaces. « L’instauration de politiques agricoles claires, fondées sur des données fiables issues des recensements agricoles, permettrait de mieux cibler les zones à développer et d’ajuster les aides publiques en fonction des besoins réels », a-t-il précisé. Un encadrement plus rigoureux des pratiques est également nécessaire, notamment en interdisant l’abattage des femelles reproductrices, afin d’éviter des décisions nuisibles à long terme pour la filière. Brahim Amrani a également proposé que « Le développement d’abattoirs locaux dans le sud du pays est essentiel pour réduire les coûts liés au transport du bétail vers le nord. Ce projet permettrait de traiter le cheptel de manière plus efficace et d’approvisionner les marchés du nord avec de la viande produite localement, réduisant ainsi la dépendance aux importations. » Enfin, la diversification de l’offre est un levier clé pour renforcer la production nationale. Il est essentiel de développer l’élevage de camelins et de caprins en complément des bovins et des ovins. Ces types d’élevage, adaptés à des conditions climatiques variées, permettraient de valoriser des ressources locales souvent sous-exploitées, tout en contribuant à la sécurité alimentaire du pays. Pour coordonner ces efforts et répondre efficacement aux besoins de la filière, une commission nationale impliquant la Fédération des éleveurs a été mise en place. Cette commission aura pour mission de recueillir les problèmes rencontrés sur le terrain et d’élaborer une stratégie pour stimuler la production et réduire les importations. L’objectif à long terme est de réduire la dépendance du pays aux importations tout en augmentant la consommation nationale de viande rouge, actuellement inférieure à la moyenne mondiale. En effet, la consommation moyenne de viande rouge en Algérie est de 23 kg par habitant par an, bien en dessous de la moyenne mondiale de 34 kg. « Pour y parvenir, il est primordial d’accroître la production locale, d’améliorer les infrastructures et de renforcer la compétitivité de la filière face aux importations », a-t-il conclu.
Par Mourad A.