Développement local: Nécessité d’une décentralisation accrue
La réunion entre le gouvernement et les walis, placée sous le thème « La collectivité locale, locomotive du développement », met en lumière le rôle central des communes et des wilayas dans la transformation socio-économique du pays. Le professeur Arezki Chenane, éminent spécialiste en sciences économiques de l’Université de Tizi-Ouzou, a apporté un éclairage précieux sur les enjeux et les solutions permettant de faire des collectivités locales le moteur d’un développement inclusif et durable.
Lors de son intervention sur les ondes de la « Chaîne III » de la radio nationale, le professeur Chenane a déclaré : « Le développement ne se décrète pas, il se construit ». Selon lui, la gouvernance locale doit être au cœur de cette transformation. Les communes, qui disposent de ressources variées (humaines, naturelles et économiques), doivent valoriser ces atouts de manière stratégique. Pour ce faire, une coordination efficace entre les différents acteurs locaux, notamment les élus et les entreprises, est essentielle. Ces dernières jouent un rôle crucial dans la création de richesse et d’emploi.Cependant, toutes les communes ne partent pas d’un même point de départ. Certaines, riches en ressources, sont mieux équipées pour amorcer leur développement, tandis que d’autres, souvent rurales ou enclavées, rencontrent des difficultés pour attirer des investissements. Bien que le système de péréquation financière existe, il reste insuffisant pour réduire ces disparités. Pour y remédier, le professeur Chenane a suggéré de renforcer l’attractivité des territoires moins favorisés en exploitant les opportunités offertes par la nouvelle loi sur l’investissement (22-18), qui prévoit des avantages fiscaux pour encourager les entreprises à s’y implanter. Le rôle des élus locaux, et notamment des présidents d’Assemblées Populaires Communales (APC), est déterminant dans ce processus. Le professeur Chenane a insisté : « Nous devons passer d’une logique administrative à une logique de développement ». Il a souligné la nécessité d’une décentralisation accrue, permettant aux élus de prendre des initiatives audacieuses sans être freinés par les blocages bureaucratiques. Les réformes en cours, telles que les nouveaux codes de la commune et de la wilaya, devraient fournir un cadre plus adapté pour permettre aux élus d’agir plus librement.Un autre aspect essentiel du développement local est l’implication active des citoyens dans la gestion des affaires locales. La démocratie participative, qui associe les habitants aux décisions locales, apparaît comme une voie incontournable pour garantir un développement durable. À cet égard, le professeur a proposé la création de guichets uniques citoyens dans les communes afin de renforcer l’interaction entre les autorités locales et les citoyens, tout en inculquant une culture citoyenne axée sur les droits et devoirs.
Face aux défis liés à l’urbanisation et à la nécessité de mutualiser les ressources, l’intercommunalité se présente comme une solution pragmatique. Cette collaboration entre communes permettrait d’optimiser les efforts de développement et de réduire les incohérences dans les politiques territoriales.
Enfin, le professeur Chenane a souligné l’importance du nouveau découpage administratif actuellement en cours de maturation. Ce processus vise à rapprocher l’administration des citoyens tout en assurant une répartition équitable des ressources. Pour qu’il soit réellement efficace, ce découpage doit s’inscrire dans une vision harmonieuse, alignée avec les objectifs du schéma national d’aménagement du territoire à l’horizon 2030.
Le développement des collectivités locales représente un enjeu majeur pour l’Algérie. Comme l’a brillamment exposé le professeur Chenane, il repose sur une gouvernance renforcée, une valorisation des ressources, une participation citoyenne active et une coopération intercommunale. Conjuguées à des réformes administratives ambitieuses, ces actions pourraient faire des collectivités locales de véritables locomotives du développement durable.
Par Mourad A.