Maladies rares: L’État veut réduire sa dépendance aux importations
L’Algérie franchit un nouveau cap dans sa quête de souveraineté pharmaceutique. Pour accélérer la production locale et renforcer l’accessibilité aux traitements essentiels, notamment en oncologie et pour les maladies rares, le ministère de l’Industrie pharmaceutique a instauré un « couloir vert ». Cette mesure vise à faciliter et à accélérer les investissements dans ces segments stratégiques où le pays demeure encore largement dépendant des importations.
Actuellement, l’Algérie couvre 76 % de ses besoins en médicaments grâce à la production locale. Toutefois, certains segments, comme les dispositifs médicaux (dont la couverture est inférieure à 2 %) et les traitements innovants, restent insuffisamment développés. « Il est impératif d’encourager les investissements dans les domaines où la dépendance aux importations demeure forte, notamment en oncologie et pour les maladies rares », a expliqué Mme Imène Belabbas, directrice centrale de la pharmaco-économie au ministère lors de son intervention sur les ondes de la « Chaîne III » de la radio nationale.Le « couloir vert » mis en place permet d’accélérer l’enregistrement des médicaments oncologiques et des traitements pour les maladies rares, tout en garantissant un cadre réglementaire rigoureux. Ce dispositif vise à réduire les délais de traitement des dossiers, tout en incitant les investisseurs à s’orienter vers ces niches thérapeutiques cruciales. « Nous facilitons l’accès au marché pour ces traitements en simplifiant les procédures administratives, tout en maintenant des exigences élevées en matière de qualité et de sécurité », a-t-elle précisé.
Parallèlement, l’Algérie poursuit sa politique de réduction des importations. Dans le cas de l’insuline, la production locale menée par Saïdal a permis de réduire considérablement la facture extérieure. La responsable a souligné que : « L’Algérie a déjà réduit ses importations d’insuline en localisant plusieurs types de production. Nous avons même commencé à exporter vers l’Arabie Saoudite ». À terme, l’objectif est d’accroître la capacité de production pour couvrir l’ensemble des besoins nationaux et se positionner comme un acteur exportateur. L’industrialisation des matières premières fait également partie de cette stratégie. « Nous avons identifié plusieurs produits prioritaires à fabriquer localement, tels que les antibiotiques, l’insuline, le paracétamol et certains traitements du cancer », a-t-elle ajouté. Ces efforts permettront non seulement d’assurer un approvisionnement régulier, mais aussi de se prémunir contre les tensions du marché international, notamment face à la dépendance vis-à-vis des producteurs chinois et indiens.
Face aux tensions sur certains médicaments, le ministère a mis en place une plateforme numérique de suivi des stocks, couvrant l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement, du fabricant au patient. « Grâce à cette plateforme, nous pouvons anticiper les ruptures et réorienter les investissements vers les segments les plus vulnérables », a expliqué la directrice. Ce système a notamment permis la localisation de cinq collyres auparavant importés, qui posaient problème en termes de disponibilité. Néanmoins, les importations demeurent une réalité, en particulier pour 200 médicaments destinés au marché de ville et une part importante des traitements hospitaliers. À l’heure actuelle, 35 % des médicaments hospitaliers sont produits localement, un chiffre que le ministère ambitionne d’augmenter grâce à l’ouverture de nouvelles unités de production et aux partenariats internationaux en cours. L’Algérie ne se contente pas de la production locale. Le pays s’engage également dans le développement de centres de bioéquivalence, afin de garantir la conformité des médicaments génériques aux standards internationaux. « Trois centres de bioéquivalence sont opérationnels et plusieurs autres sont en projet », a annoncé la responsable. Cette avancée est cruciale pour la crédibilité des produits algériens sur le marché international et ouvre des perspectives pour les exportations. Par ailleurs, des centres d’essais cliniques en vie réelle sont en cours de développement afin d’évaluer l’efficacité des traitements sur la population algérienne. « Il est essentiel de nous assurer que les médicaments, notamment les innovations thérapeutiques et les traitements pour maladies rares, sont adaptés à notre population. C’est un enjeu majeur pour notre souveraineté pharmaceutique », a-t-elle conclu.
Par Mourad A.