Retrait des subventions de carburants: Les marchés de capitaux sanctionnent le Nigeria
Le Nigeria est confronté à l’arbitrage entre la satisfaction des populations les plus pauvres et la nécessité de rassurer les marchés financiers internationaux de la dette. La décision reviendra au nouveau président élu et elle ne sera pas facile à prendre.
Sur les marchés internationaux de la dette, les titres d’emprunt émis par le Nigeria sont sanctionnés par les investisseurs internationaux et ont perdu de la valeur, signalant un recul d’intérêt de la part de ces derniers. Techniquement, cela n’affecte pas les titres actuels, mais dans la perspective où le pays ouest-africain voudrait mobiliser de nouvelles ressources à l’international, cela lui coûterait plus cher encore.
Cette situation est survenue à la suite d’un commentaire de la ministre des Finances Zainab Ahmed qui a fait allusion au fait que la suppression des subventions de carburants, qui plombent la capacité du Nigeria à rembourser ses dettes, pourrait être reportée, rapporte Bloomberg citant des documents officiels.
Comme c’est le cas pour beaucoup de pays africains, des institutions comme le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale recommandent vivement la suppression des subventions de carburants expliquant que cela profite aux plus riches. L’argument est solide et trouve une certaine cohérence dans la réalité pratique. Mais le retrait de la subvention se traduit très souvent par un affaiblissement du pouvoir d’achat qui frappe plus durement les personnes les moins riches financièrement.
Le gouvernement du futur ex-président du Nigeria, Muhammadu Buhari, avait promis de supprimer les subventions de carburants dont la facture est estimée en 2023 à 13 milliards $. Maintenant qu’un autre président dirigera le pays dès le 29 mai de cette année, la décision appartiendra au nouveau gouvernement qui sera mis en place.
Mais entre des prix dont la progression continue d’être à deux chiffres, une monnaie qui se déprécie face aux principales devises étrangères et des risques climatiques qui menacent de provoquer un renchérissement des prix alimentaires, la décision de supprimer les subventions risque de ne pas être prise à la légère et la commission mise en place à cet effet est sur une mission complexe.
Même dans des économies très développées comme celles de l’Union européenne, des prix élevés de carburants ont conduit les pays à injecter plus de 360 milliards $ de subventions au profit des consommateurs en 2022, tandis que la totalité des pays émergents, y compris ceux d’Afrique, n’ont subventionné que pour un peu plus de 110 milliards $, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE).
Le Nigeria symbolise un blocage complexe qui concerne la plupart des pays d’Afrique subsaharienne, contraints d’importer l’énergie dont ils sont dépendants à partir de marchés où ils n’ont aucun contrôle sur les prix. D’un côté, les revenus et le pouvoir d’achat qu’ils confèrent sont souvent faibles pour une majorité des populations et de l’autre, les ajustements à la hausse des prix de l’essence peuvent constituer des chocs compliqués à surmonter sur le court et le moyen terme.