La transition numérique en Tunisie à l’horizon 2050: Bien des efforts, mais…
La rareté des compétences numériques sur le marché du travail est amplifiée par l’accentuation de l’immigration vers l’étranger étant donné que plus de 20% des diplômés de l’université tunisienne vivent dans les pays de l’Ocde. Ce phénomène risque de s’accentuer dans le futur.
Les trois prochaines décennies seront fortement impactées par les technologies numériques conduisant à des ruptures importantes dans nos modes de vies. Sur le terrain, plusieurs technologies émergentes attirent, d’ores et déjà, l’attention et sont au cœur du fonctionnement de nos sociétés. Par ailleurs, l’Intelligence Artificielle aura un impact sur l’avenir de pratiquement tous les domaines de la vie des êtres humains. Partant de cette réalité et de ses convictions, l’Institut tunisien des études stratégiques (Ites) vient d’élaborer une nouvelle étude sur « La transition numérique en Tunisie à l’horizon 2050 : vision et manœuvre stratégique ».
Quel diagnostic ?
Pendant les dernières décennies, l’économie tunisienne et ses évolutions n’ont pas permis l’émergence d’une économie forte avec notamment des niches à haute valeur ajoutée. Les besoins, en termes de digitalisation et de technologies digitales, ont été faibles. Dans le même temps, la Tunisie a pu investir et fournir une infrastructure numérique adéquate. Cependant elle ne dispose pas encore d’une infrastructure numérique suffisante pour que les effets sur la productivité et sur la croissance se manifestent.
Malgré cette situation, le pays a cherché à accompagner la transition numérique en mettant en place des institutions adéquates dans le domaine numérique. Néanmoins, la gouvernance globale du pays souffre de difficultés ayant des impacts négatifs sur le processus de digitalisation.
La Tunisie a tenté, également, d’investir dans le capital humain de manière générale et dans les compétences numériques de manière spécifique avec des résultats mitigés. De manière générale, le pays a cherché à accompagner la transition digitale par la mise en place de nombreuses institutions adéquates qui ont marqué le pas durant la dernière décennie.
Bien que des efforts importants aient été déployés pour bien gouverner la digitalisation en Tunisie, force est de constater que la gouvernance est considérée de nos jours comme un des points faibles majeurs et que la législation semble même perçue comme un frein à la transition digitale par les principaux acteurs de l’écosystème du numérique.
L’accumulation du capital humain menacée
Aujourd’hui, la Tunisie est confrontée à une grave crise d’apprentissage affectant la majorité de ses élèves. Cela se traduit par des performances faibles en termes d’Indice de Développement Humain (IDH). Selon le rapport sur le développement humain de 2020, la Tunisie conserve son classement de 95e avec un score de 0,740 (un des scores les plus élevés parmi les pays arabes non pétroliers) mais très loin derrière les pays comparables.
Concernant la formation d’un capital humain spécifique au secteur du numérique, l’étude a mentionné le démarrage de la formation en génie informatique au début des années 1970 à la Faculté des Sciences de Tunis, suivi par la création, en 1984, de l’Ecole nationale de l’informatique. En effet, la formation au digital à l’époque obéissait davantage à des politiques d’aménagement pour répondre d’abord aux besoins de l’administration et du secteur public. Entre 1997 et 2006, les étudiants inscrits dans les filières TIC ont quasiment décuplé sous l’impulsion de la création de plusieurs cycles de formation, pour la plupart courts. La libéralisation des secteurs des télécommunications, de l’informatique et de l’internet de 2002 à 2009 a entraîné des besoins accrus en termes de capital humain qualifié.