09/05/2025
ACTUINTERNATIONAL

SOMMET DES BRICS: La fin du roi dollar ?

L’idée de s’affranchir du billet vert et de l’hégémonie occidentale séduit le Sud global, bien au-delà du groupe des Brics. Mais est-ce vraiment réalisable ? Les réponses de la presse internationale.

A u commencement étaient les Bric, quatre pays à forte croissance économique, le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine, groupés dans cet acronyme apparu en 2001 sous la plume d’un économiste de Goldman Sachs. En 2011, le groupe s’étoffe avec l’arrivée d’un nouveau membre, l’Afrique du Sud. Et ce “club des cinq” pèse lourd : plus de 42 % de la population mondiale, 23 % du produit intérieur brut mondial et 18 % du commerce international. Un commerce international dans lequel les transactions restent majoritairement libellées en dollars.

C’est notamment ce point qui sera discuté au sommet des Brics, à Johannesburg, en Afrique du Sud, du 22 au 24 août : est-il possible de s’affranchir du dollar, en créant, par exemple, une monnaie commune? Une question éminemment politique, posée dès juin par le président brésilien Lula. En effet, le billet vert, hégémonique, est une arme économique puissante. Les sanctions qui s’exercent sur la Russie depuis le début de la guerre en Ukraine en sont la démonstration. De fait, la Russie – dont le président, Vladimir Poutine, sous le coup d’un mandat d’arrêt émis par la Cour pénale internationale, sera absent du sommet – semble être le membre des Brics le plus favorable à cette idée.

Mais est-ce un projet réaliste? se demande le journaliste sud-africain Peter Fabricius dans l’article du Daily Maverick qui ouvre ce dossier. Certes, le dollar est déjà en recul dans les transactions internationales… notamment dans les pays du Golfe.

Le royaume saoudien airmait d’ailleurs en début d’année être prêt à libeller certaines transactions dans d’autres monnaies que le dollar. Mais quelles monnaies? Une réponse se dessine si l’on examine les chiffres de ces derniers mois. Entre février 2022, juste avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie, et février 2023, la part du dollar est passée de 86,8 % à 84,3 % des transactions mondiales, tandis que celle du yuan augmentait de 2 % à 4,5 %.

Et c’est bien là tout le problème. Pour Iraj Abedian, directeur général de Pan-African Investment and Research Services, un cabinet de conseil et de recherche économique de premier plan établi en Afrique du Sud, “l’idée d’une monnaie spéciique aux Brics est une démarche essentiellement politique de la part de la Chine pour asseoir sa position dans le monde, en partant du principe que cette monnaie serait en grande partie fondée sur le yuan chinois”, rapporte le Daily Maverick. La solution? Une monnaie numérique unique, propose dans le quotidien russe Moskovski Komsomolets l’analyste Natalia Miltchakova. Cela éviterait selon elle l’hégémonie financière d’un autre pays. À terme même, si chaque pays des Brics émettait sa monnaie nationale numérique, “une devise commune ne serait peut-être plus indispensable”. Pour la Russie, cela réduirait les risques liés aux sanctions, augmenterait le prestige du rouble numérique et attirerait encore plus de pays au sein des Brics, soit “autant de nouveaux partenaires et de marchés pour Moscou”.

L’élargissement du groupe des Brics à de nouveaux pays est précisément le second volet du sommet à venir : 67 pays du Sud global ont été invités par Pretoria pour assister à l’ouverture et à certains événements du sommet. Et une vingtaine se sont déjà portés candidats pour rejoindre le groupe. Le problème, relève le Financial Times, réside dans les équilibres au sein des Brics. “La Chine est le seul des cinq États à avoir passé un cap, sur le plan tant économique que diplomatique. C’est d’ailleurs Pékin qui souhaite ardemment élargir le club. Mais si les États qui entrent sont redevables à la Chine […], alors les Brics ressembleront moins à un groupe de pression en faveur des pays du Sud qu’au fan-club d’une puissance hégémonique en devenir.” Et si le désalignement passe par une dédollarisation de l’économie, alors il faut s’attendre à ce que la transformation soit longue… Et “ça ne sera pas un processus pacifique”, prévient l’ancien Premier ministre de Taïwan, Chen Chong, dans le journal taïwanais Yuanjian. Un processus dont les prémices s’écriront peut-être lors du sommet de Johannesburg. Bonne lecture.

Source : Courrier international

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