L’IA, un Outil ou un Collègue ?
Nous constatons, à travers les publications scientifiques et les médias, que l’écart entre intelligence biologique (humaine) et intelligence artificielle (IA) se rétrécie de jour en jour. Des algorithmes nous demandent si nous sommes des robots avant de nous accorder l’accès à des sites ou plateformes sensibles (comme ceux liés aux mondes de la finance et de l’administration de souveraineté). Selon les tendances observables de l’évolution technologique, cet écart va disparaitre progressivement sur les quelques années à venir. L’application GptChat4 nous donne un avant-goût de cette évolution.
D’autres spéculations vont vers la fusion de l’humain et de la machine. Allons-nous voir naitre une nouvelle espèce humaine qui va supplanter l’Homo Sapiens ? Rien n’est sûr pour le moment ; mais rien n’est impossible. Des outils, qui nous sont chers, les technologies numériques (en particulier l’apport de l’IA) vont devenir nos collègues, nos partenaires ou alliés, nos confidents, nos compagnons professionnels, ….
Chez les économistes néoclassiques, l’homo economicus, cet être parfaitement rationnelle dans ses choix a toujours existé et a constitué même la principale hypothèse de leur raisonnement, car il est doté d’une rationalité absolue (par opposition à la rationalité limitée de H. Simon). Par ailleurs, la recherche de la croissance de la productivité est l’autre préoccupation des économies et des économistes. Avec l’IA et son support la robotisation, la croissance de la productivité serait un jeu d’enfant. Alors quelles en seraient les conséquences. Elles sont d’ordre économique en premier lieu mais aussi politiques, sociales, philosophiques, éthiques, psychologiques…
Au plan économique, la première conséquence serait certainement sur l’emploi. La machine va remplacer, c’est déjà le cas, plusieurs tâches effectuées par les hommes, et dans un deuxième temps remplacer tous les emplois exercés par les hommes, à commencer par les métiers de médecins, d’avocats, de comptables, d’architectes, de professeurs, de journalistes, de coiffeurs, de biologistes…. La connexion entre l’IA et l’imprimante 3D va élargir le champ de remplacement de l’homme par la machine à d’autres emplois et activités, comme la construction d’ouvrages ou de maisons (un pont a été construit à Amsterdam et une maison dans la banlieue de New York).
L’augmentation permanente et continue de la productivité est en soi réjouissante. Elle crée de la richesse plus vite et à moindre coût. Que vont faire les hommes libérés des tâches et des emplois ? Vont-ils bénéficier d’un revenu décent et à vie ? Les plus optimistes des futurologues diront que le temps gagné grâce à la machine sera utilisé aux loisirs et aux relations sociales. Les plus pessimistes diront que ce sont les rapports sociaux qui vont subir les plus grandes conséquences et il est difficile d’en apprécier l’évolution ; de nouvelles formes d’organisation du travail et des relations sociales et de répartition de la richesse vont émerger. A quoi servent les institutions publiques si elles n’ont plus aucun rôle dans la société ? Idem pour les élus et les institutions politiques, les syndicats, … Chacun de nous aura besoin d’un compagnon (IA) pour les besoins de la vie au quotidien, ou comme collègue dans le travail, peut-être même avoir un chef (IA), car plus compétent, plus disponible, et peut-être plus efficace. Mais qui va financer les retraites des séniors ? Va-t-on vers un système de cotisation des robots, du moins pendant une période de transition. Un nouveau monde, de nouvelles règles, et plus inquiétant de nouvelles valeurs.
In fine, on reprend l’interrogation philosophique : « Ce qu’on gagne vaut-il ce qu’on perd ? ».
Anouar El Adaloussi