-Chronique Eco- La Cour des comptes, le principal pilier de la gouvernance publique
Tous les pays disposent d’une institution supérieure de contrôle des fiances publiques. Les appellations diffèrent mais les grands principes et les objectifs sont très convergents, même si des nuances sont constatées. Ainsi, on trouve les terminologies : Cour des comptes (la plus usitée), Tribunal des comptes (Portugal, Espagne…), Cour suprême des comptes (Iran), Contrôleur/Vérificateur Général (USA, Canada…), Auditeur Général (Suède, …). En matière de missions aussi il y a une forte convergence, mais celles-ci ont évolué progressivement pour aboutir à des standards et des normes universels.
Les cours des comptes sont, dans tous les pays, le principal dispositif de la gouvernance publique. En effet, elles incarnent, à travers leurs missions, les grands principes de la gouvernance : Transparence, rendre compte (responsabilité), information des citoyens, lutte contre la corruption et performance. Originellement, la Cour des comptes effectue la vérification des comptes publics dans le cadre du contrôle de la conformité des opérations comptables. En somme un contrôle à postériori de la régularité de la dépense publique. Par la suite, les Etats ont jugé utile de confier à leurs Cours des comptes des missions plus larges et plus complexes, car elles renvoient à la responsabilité des fonctionnaires, à l’évaluation de l’action publique et à l’information des élus.
Cette évolution a été accompagnée par une nouvelle terminologie ; on parle de l’audit des comptes, de la qualité de la gestion, de l’évaluation des politiques et programmes publics et même de la performance des entreprises et organismes publics se situant dans la sphère marchande.

Dans le contexte algérien, la Cour des comptes est une institution supérieure de contrôle prévue par la Constitution révisée en 2020. L’article 201 de la Constitution stipule que « …la Cour des comptes participe à la promotion de la gouvernance et de la transparence dans la gestion des deniers publics et de la reddition des comptes. ». En matière d’information des citoyens, la Constitution révisée a introduit une nouvelle disposition imposant au Président de la Cour des comptes la publication du rapport annuel. Jusqu’en 2020, cette publication était soumise à l’autorisation préalable du Président de la République. En effet, entre 2000 et 2020, seuls deux rapports annuels ont été publiés, alors que depuis 2021, les rapports sont publiés régulièrement et de l’avis des connaisseurs de la chose publique, la qualité de ces rapports est considérée comme très bonne.
Les bonnes pratiques en matière de gouvernance financière sont fortement liées à l’exercice des missions par l’institution de contrôle. Un avant-projet de loi organique définissant l’organisation et précisant les missions et les règles de fonctionnement ainsi que le statut de son personnel a été élaboré. Il faut espérer que le projet de loi ait prévu un renouveau des missions en allant vers de nouveaux champs d’investigation comme l’Audit des systèmes de gestion pour renforcer la sincérité des comptes et l’image de fidélité du résultat des opérations ainsi que la situation patrimoniale de l’Etat… Le contrôle de la qualité de gestion doit aussi s’ouvrir sur de nouvelles méthodologies d’évaluation de la performance des organisations publiques. Aujourd’hui, les Cours des comptes s’inspirent fortement, pour leurs techniques et outils de contrôle, des pratiques des cabinets d’Audit. Elles vont jusqu’à la certification des comptes sur le modèle des commissariats aux comptes des entreprises économiques.
Il faut espérer aussi que les moyens d’intervention de la Cour se renforcent davantage en ressources humaines et en moyens techniques. Par ailleurs, il serait aussi souhaitable de voir le renforcement du contrôle au niveau territorial par les chambres territoriales qui gagneraient à être plus autonomes et mieux dotées en ressources.
ANOUAR EL ANDALOUSSI